Mon dernier livre est disponible sur le site de l’éditeur, Chronique sociale, et dans toutes les libraires.
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L’épilogue de « Oser l’invisible »
Aussi loin que je me souvienne, je me suis interrogée sur la vie et son sens. Petite, je me demandais : « Mais c’est quoi la vie ? » Ou encore, face à la solitude, la violence ou la tristesse que j’observais autour de moi : « Mais pourquoi les adultes sont-ils comme ca ? »
J’avais 36 ans lorsque j’ai vécu une expérience de sortie hors du corps. Cette expérience d’expansion de conscience m’a fait entrer dans une autre réalité que la réalité matérielle. Cette autre réalité ne relevait plus seulement d’une intuition ou d’un ressenti diffus qui m’avait habitée jusque-là. Elle devenait réelle, étonnante, et surtout faite de lumière et d’amour. Cette expérience m’a ouvert de nouvelles perspectives sur ce qu’était la vie sur Terre qui m’apparut dès lors comme un cheminement initiatique à la rencontre de soi-même et de sa propre essence. C’était devenu une évidence.
À l’époque, un ami journaliste scientifique, auquel j’avais raconté mon expérience, m’avait mise en garde. Son conseil était de passer cette expérience sous silence dans ma vie professionnelle, sous peine, selon son expression, « de me griller à tout jamais dans le métier ». J’étais consultante en ressources humaines et stratégie sociale à l’époque.
Un psychologue réputé, auquel je m’étais confiée, m’avait quant à lui encouragée à profiter de mon expérience à titre personnel, mais il avait dans le même temps ajouté que, selon lui, il resterait toujours un tabou en ce qui concernait l’être humain.
Quelques mois plus tard, je l’ai raconté dans les pages qui précèdent, un scientifique réputé a renoncé à préfacer un de mes ouvrages qui traitait de management et de changement, car j’y parlais de spiritualité. En tant que scientifique il ne pouvait pas, m’avait-il dit, cautionner ce sujet. Le thème ne représentait pourtant que quelques pages sur près de quatre cents.
Peu de temps après, j’évoquais avec un consultant en management, inspirateur de nombreux dirigeants, la nécessité selon moi de décloisonner nos institutions et nos entreprises, et de créer des passerelles, pour laisser l’intelligence et les savoirs circuler. C’était, me semblait-il, une nécessité vitale à l’échelle de la société. « On ne peut pas décloisonner à ce point, ce n’est pas possible » m’avait-il objecté.
Quelques années passèrent durant lesquelles j’ai poursuivi mes explorations. J’ai continué à croire aux bénéfices de la transversalité et du décloisonnement dans nos organisations, et à les promouvoir. J’ai également continué d’affirmer le rôle central qu’y tiennent les relations humaines. Je me suis parallèlement formée à certaines pratiques d’expansion de conscience, j’ai progressé sur les voies ouvertes par les enseignements des Traditions de sagesse, et j’ai appris à laisser mon extra-sensorialité s’exprimer.
Je travaillais occasionnellement avec un psychologue qui consacra, avec talent, sa vie et son énergie à faire évoluer l’éducation des enfants pour y laisser entrer plus de vie, de psychologie et de motivation. Un jour, alors que j’évoquais avec lui l’importance selon moi de sensibiliser les humains, et notamment les jeunes, aux dimensions sensibles et subtiles de nous-mêmes, au-delà de la matérialité, dimensions que nous pouvons toutes et tous ressentir si nous le souhaitons, il me dit : « Mais ça, c’est mystique, c’est autre chose. Ce que nous faisons est concret. » Pour moi, ce n’était pas autre chose.
Je me suis heurtée toutes ces années à bien d’autres barrières psychologiques, culturelles et conventionnelles, qui m’empêchaient de questionner ouvertement, dans l’espace public, l’invisible dont le monde qui nous entoure, tout comme le vivant et nous-mêmes, sommes faits.
Mais les temps changent. Vingt ans après, les dirigeants des grandes entreprises partent en retraites spirituelles. Les scientifiques nous parlent du pouvoir de l’esprit, et nous disent que nos émotions et nos intentions sont capables d’agir sur la matière. Ils nous disent également, rejoignant par là même les traditions spirituelles qui l’enseignent depuis toujours, que rien n’est séparé, mais au contraire que tout est relié. Le cloisonnement est une invention des humains, décloisonner ne tient qu’à nous. Quant à la médecine, elle se fait de plus en plus quantique et énergétique. Et les enfants, eux, méditent à l’école.
C’est indéniable, il se passe quelque chose : nous sommes en train de nous ouvrir au sensible, au subtil, à l’immatériel, et à l’invisible. Nous cherchons, ailleurs que dans le savoir académique, dans le pouvoir et dans l’avoir, le sens de nos vies.
Les demandes des dirigeants, managers ou acteurs politiques que je rencontre aujourd’hui ont un point commun. Il s’agit pour eux de s’autoriser à se réapproprier pleinement leur potentiel, y compris spirituel. Ils veulent se sentir alignés, en cohérence avec eux-mêmes, avec leurs rêves, leurs aspirations et leurs valeurs profondes, dans toutes leurs dimensions. Il ne s’agit pas de nier la réalité physique, intellectuelle, et émotionnelle. Mais de la rendre plus vaste. Pour eux-mêmes avant tout bien sûr. Mais aussi pour le collectif, afin d’agir plus consciemment, dans le respect de la vie, de ses équilibres, de ses lois naturelles.
On pourrait se dire qu’il s’agit là seulement d’un désir d’élargissement de notre champ d’action et d’être, et que cela ne changera pas grand-chose au monde tel que les humains le font avancer sur cette planète depuis des décennies. On peut penser que la compétition quasi-guerrière a encore de beaux jours devant elle.
Sauf que, lorsqu’on a cheminé dans les dimensions les plus subtiles de soi-même, on sait que quelque chose a changé. Ce quelque chose s’appelle la sensation d’amour et de gratitude, la sérénité, la fluidité, la paix, l’unité. Ce quelque chose nous transforme. Et c’est parce que cela nous transforme, que le monde peut, peu à peu, se transformer, en avançant lui aussi vers plus d’amour et de gratitude, de sérénité, de fluidité, de paix, d’unité. Même dans le monde des affaires, même dans le monde politique, comme dans l’ensemble de la société, c’est possible. C’est en cours.
La métamorphose est encore imperceptible mais elle est à l’œuvre, en ce moment même. Nous en sommes les artisans.